Emancipator, coup de coeur assuré
Découvert une première fois sur une compilation du label du regretté Nujabes, Hyde Out production, avec le morceau " With Rainy Eyes ", ici ce n'est pas moins d'une heure de pur bonheur que nous propose Emancipator.
De cet album se dégage une chaleur et une ambiance rarement atteinte. Un album très downtempo, empli d'instrumentales chaudes et mélancoliques. Les morceaux sont tous d'une pureté et d'une netteté quasi-parfaite.
Quelques voix, souvent indistinctes, viennent parfois se mêler aux divers instruments et gazouillis d'oiseaux. La batterie rythme avec précision, dynamisme et sans bavures les pistes. Le piano et le violon transforment l'atmosphère d'un rude hiver en celle d'un doux printemps. Par moment, une guitare vient syncoper l'ambiance en remplaçant le violon.
Conséquence de toute cette simplicité, l'album est accessible à tous. Il n'y a pas la moindre difficulté à entrer dans l'univers d'Emancipator, à le comprendre et à l'apprécier.
Plus qu'un album de musique, Soon It Will Be Cold Enough est un roman, un poème, un hymne à la simplicité, au calme et à la beauté. Pour ceux qui aiment les petites comparaisons alors ce premier LP n'a rien à envier à un album de Bonobo, quel qu'il soit. Un album à posséder absolument, à écouter sans réserve, en boucle, que ce soit le matin, le midi, le soir, seul ou en groupe.
4 ans plus tard, c'est l'heure de la récidive... Et on l'attend au tournant !
"Safe in the step cliffs" marque le grand retour d'Emancipator. On retrouve cette ambiance si particulière du premier disque, et comme le fait remarquer l'artiste, une présence accrue d'instruments organiques. Bien entendu, les différentes influences (abstract, electronica, ambiant...) n'ont pas disparu, mais le tout se fait sentir légèrement moins électronique.
Un bon disque qui permet à Emancipator de dépasser le statut de "petit nouveau", et de s'imposer en référence d'une musique épique et riche en émotions.
CINQUIEME ALBUM : Baralku (2017)
Tout juste un an après la diffusion de l’EP Maps & Father King, Emancipator continue à faire du mois de novembre sa chose avec la parution de Baralku, un cinquième long-format hanté par la délicatesse.
Si Seven Seas, son prédécesseur sorti en 2015, pouvait laisser un certain goût d’inachevé, la faute à un trop grand nombre d’invités qui altéraient l’expression de sa personnalité, il marquait néanmoins un virage plus apaisé dans la discographie du producteur américain.
A l’occasion de Baralku, Emancipator poursuit sa quête de sérénité, tout en se concentrant sur l’essentiel : les nappes synthétiques mélodieuses, les beats généreux et l’accumulation de ces détails qui semblent permettre de redécouvrir l’oeuvre à chaque écoute. Celui qui a été révélé par Nujabes et avait marqué les esprits avec Shook, mash-up associant le Shook Ones (Part II) de Mobb Deep au Untitled 1 de Sigur Rós, est un habitué de ces expérimentations sonores qui n’en demeurent pas moins accessibles et relativement immédiates. L’écoute attentive de ses productions permet néanmoins d’en apprécier la profondeur, à commencer par les synthétiseurs doux et rêveurs du Baralku initial, dont l’apparente instantanéité n’est qu’un trompe-l’œil lié à un efficace travail de fond.
Après cette introduction, ce sont les beats cristallins chers à Emancipator qui reprennent leurs droits, et ceux-ci sont soutenus par des synthés et arrangements de cordes synthétiques sur Ghost Pong. Les boucles vocales angéliques et circonvolutions doucereuses s’agglomèrent sur Tree Hunt, sommet d’éveil initiatique contagieux, tandis qu’une electronica aux textures poreuses émane de Bat Country. Lorsqu’il mêle des cordes, névrotiques aux entournures, et des beats délicats sur Goodness, premier single de ce cinquième LP, Doug Appling évolue dans un registre qui, une certaine légèreté en plus, n’est pas sans évoquer celui de Chapelier Fou.
La formation classique de l’artiste basé à Portland apparaît aux détours des percussions jazzy sur un Pancakes aux cordes évanescentes ou à l’occasion des vents d’un Rappahannock downtempo. Time for Space rappelle qu’Emancipator est, depuis ses débuts, l’apôtre d’un trip-hop 2.0 libertaire qui a su se démarquer du mouvement bristolien, avant d’achever ce disque avec un Sands planant à souhait, les rythmiques downtempo constituant un écrin qui met en valeur des nappes dégageant autant d’optimisme que de sérénité.
Après la baisse de régime d’un Seven Seas qui lui a tout de même permis de faire évoluer ses sonorités vers une sérénité plus marquée, Emancipator retrouve le niveau créatif d’un Dusk To Dawn apprécié dans nos colonnes dans un registre situé aux confins de l’abstract et du downtempo.
(source : Elnorton/http://www.indierockmag.com)