Phoenix, les précurseurs de la French Touch
Que s'est-il passé dans les lycées versaillais dans les années 1990 pour qu'autant de musiciens en soient issus ? À l'image des membres du groupe Air, d'Etienne de Crécy ou d'Alex Gopher, trois des quatre membres du groupe se sont rencontrés sur les bancs du lycée Hoche de Versailles.
Pendant leurs années de lycée, Thomas Mars, Deck d'Arcy et Christian Mazzalai commencent à jouer ensemble. En 1995, ils sont rejoints par Laurent Brancowitz (frère de Christan Mazzalai). Ce dernier est un ex-membre de Darlin' (aux côtés de Guy-Manuel de Homem Christo et Thomas Bangalter, futurs Daft Punk), groupe éphémère qui n'a donné qu'une poignée de concerts et sorti un single sur Duophonic, le label de Stereolab, qui se vendra à 1500 exemplaires. Darlin' pastichait les Beach Boys sur fond de guitares distordues et batterie répétitive
En 1997, à l'image de Grand Royal, le label des Beastie Boys, ils créent leur propre label Ghettoblaster, lequel ne veut s'enfermer dans aucun style. Ils pourront produire du hip-hop, du folk, de la country, du funk ou du rock, pourvu que cela s'intègre dans la dynamique qu'ils souhaitent mettre en place. Ils se construisent alors leur propre studio : le Royal Riot.
En plein hiver 1997, sur ce micro-label sort le premier 45-tours de Phoenix. Les deux morceaux qui y figurent « Party Time » et « City Lights » sont des bombes de hip-hop et de folk. Le groupe joue alors les VRP et parvient à installer ce single sur les platines de Fun Radio et à faire entrer ce titre dans la playlist du Rock 30.
Il faut attendre 1999 pour entendre la suite. Le label Source (affilié à Virgin) signe le groupe et sort le simple « Heatwave », un single discoïde et un virage à 180° par rapport à leurs premières productions. Phoenix apparaît également sur la compilation Source Rocks du label homonyme (cette compilation proposait une palette de la production rock française du début des années 1990).
En juin 2000, sort enfin un premier album, United. Mais les critiques sont partagées, car la musique créée par le groupe, un mélange de pop des années 70 fortement influencé par le rock FM des années 1980, est loin de faire l'unanimité, tout du moins en France. Deux singles vont toutefois permettre au groupe de développer sa popularité : « Too Young » et « If I Ever Feel Better ».
Contrairement à la France, la crédibilité du groupe s'accroît rapidement dans les pays anglo-saxons, leur pop rock calibré rencontrant un écho important aux Etats-Unis. On leur y reconnaît la fraîcheur et la spontanéité de la musique du groupe. Mais c'est aussi cet aspect superficiel, voire insipide, qui génère le plus de critiques en France. Le choix d'une musique en décalage avec les goûts du moment, alliée à l'image de slackers véhiculée et revendiquée par les membres du groupe, ont développé une image négative du groupe en France.
Mais la French Touch se développe et Phoenix tire rapidement bénéfice de l'engouement de l'époque pour les Frenchies. Les deux années qui suivent la sortie du premier album sont dédiées à la scène. Le groupe voit croître son succès à travers le monde.
Phoenix assoit sa notoriété lorsque Sofia Coppola choisit les deux singles de l'album, « Too Young » et « If I Ever Feel Better », pour figurer sur la bande originale du film Lost In Translation. Les frères Farrelly font de même pour XXL, l'amour extra-large ». (Il ne s'agit d'ailleurs pas des réels débuts en matière de bande originale pour Phoenix puisqu'en 1999, lorsque Sofia Coppola avait confié la bande-son de son premier film, Virgin Suicides au groupe Air, Thomas Mars y avait alors déjà interprété un titre intitulé « Playground Love » sous le pseudonyme de Gordon Tracks).
Il s'agit maintenant pour le groupe de construire une suite à United. Les influences multiples et les choix musicaux nécessaires à la réalisation d'un deuxième album sont autant de problèmes à résoudre. L'album est enregistré dans le studio du groupe, puis retravaillé au studio Sound Factory de Los Angeles. Phoenix fait appel à Tony Hoffer, qui a déjà produit des albums pour Beck, Air et Supergrass, les assiste dans la production.
L'album sort en mars 2004 et s'intitule Alphabetical. Il reprend les recettes pop du groupe en y incorporant une touche d'easy listening et un zeste de R&B sur des rythmiques electro. Sans avoir modifié fondamentalement sa musique, le groupe trouve désormais des adeptes en France. Pour la conception de la pochette, Phoenix fait appel à Hedi Slimane, photographe des stars du rock et accessoirement styliste chez Dior.
Une tournée internationale est programmée après la sortie de l'album. Pendant les mois qui suivent, Phoenix se produit en Allemagne, en Angleterre, aux États-Unis, dans les pays scandinaves ou au Japon. Quelques dates sont organisées en France, à la Boule Noire et à la Cigale (Paris). Dans le prolongement de la tournée sort Live! Thirty Days Ago, enregistré en majeure partie en Scandinavie (à Oslo), où le groupe rencontre un succès particulièrement important. Le disque sort aux États-Unis en février 2005.
Phoenix s'attelle ensuite à la réalisation de son nouvel album studio. Cette fois, direction Berlin. Les musiciens cherchent à retrouver un sentiment d'urgence et travaillent rapidement, puis compilent leur travail en trois mois. Le résultat s'intitule It's Never Been Like That. Ce nouveau disque, s'il sonne légèrement plus rock, n'apporte pas de réelle nouveauté et laisse un arrière-goût de déjà entendu. Il permet toutefois d'élargir le public du groupe, particulièrement en France.
En 2006, les Versaillais participent également à la bande originale du film de Sofia Coppola Marie-Antoinette et y interprètent leur propre rôle de musiciens dans une scène en forme de clin d'oeil. Le groupe propose également à Roman Coppola de réaliser un clip sur le morceau « Funky Square Dance ». En définitive c'est un court-métrage de neuf minutes qui est tourné pour illustrer ce titre.
Il s'agit alors pour le groupe de conquérir enfin le public français. À l'occasion d'une nouvelle tournée mondiale (aux États-Unis, au Japon, au Royaume-Uni...), plusieurs dates sont programmées dans les festivals de l'été 2006 dont Rock en Seine. Le groupe se produit également en 2007 au Printemps de Bourges et aux Eurockéennes de Belfort. Phoenix y montre l'étendue de son talent scénique et, enfin, le public français commence à porter un réel intérêt à sa musique. Le 29 juin 2007, un concert réunit une série d'artistes originaires de Versailles dans les jardins du château. Air, Phoenix, Étienne de Crécy et Alex Gopher sont à l'affiche.
Le quatrième album Wolfgang Amadeus Phoenix, produit par Philippe Zdar, sort en avril 2009 et entre directement à la 14e place du classement des ventes en France. C'est le signe que Phoenix ne fait désormais plus partie des espoirs mais bien des acteurs majeurs de la pop française. Le public américain, séduit par « Lisztomania », acclame le quatuor qui remporte un franc succès en concert et rafle au passage un Grammy Award.
C'est en toute discrétion que le groupe retourne en studio pour l'enregistrement de son cinquième effort avec Philippe Zdar. Baptisé Bankrupt!, celui-ci paraît en avril 2013, précédé de l'extrait « Entertainment ».
Il faut ensuite attendre pas moins de quatre années pour écouter son successeur, Ti Amo (2017), porté par les singles « Ti Amo », « J-Boy » et « Goodbye Soleil ». La tendance électronique du groupe se confirme plus que jamais dans cet hommage dansant à l'italo-disco des années 1980.
Copyright 2019 Music Story
Il faut ensuite attendre pas moins de quatre années pour écouter son successeur, Ti Amo (2017), porté par les singles « Ti Amo », « J-Boy » et « Goodbye Soleil ». La tendance électronique du groupe se confirme plus que jamais dans cet hommage dansant à l'italo-disco des années 1980.
Copyright 2019 Music Story